Autrefois appelée Nouvelles-Hébrides, le Vanuatu est un État insulaire situé dans le sud-ouest de l’océan Pacifique. Cet archipel d’environ 80 îles devient indépendant que le 30 juillet 1980 tandis que la Nouvelle Calédonie, après trois référendums, reste à ce jour au sein de la République Française. L’exposition, qui revient sur les conditions de vie en colonie dans le Pacifique francophone, offre l’opportunité d’une immersion dans la période coloniale à travers 110 photographies prises entre 1880 et 1950, mettant en scène la vie quotidienne des acteurs en présence, des populations autochtones aux colons, en passant par les condamnés au bagne libérés et les travailleurs engagés et importés.
Divisions durables
Comme le rappelle l’historienne Isabelle Merle, à l’initiative de l’exposition avec l’anthropologue Marie Durand, « la colonisation, ça commence par la guerre et cela génère des divisions durables » ! Comme partout dans l’Empire, la période de pacification occasionne la création de corps supplétifs qui participent à la colonisation, après avoir eux-mêmes été réprimés. L’empire autorise l’éloignement de résistants vers d’autres territoires sous domination, comme on peut le constater sur l’une des photos où l’on peut voir des mokranis, résistants kabyles, bannis en Nouvelle Calédonie.
Ces « algériens du Pacifique » sont issus de l’aristocratie guerrière. La révolte des Mokranis de 1871 est mentionnée sur le monument des Mobiles à Marseille. Elle illustre les sanctions attribuées aux insurgés ayant participé à la résistance contre la colonisation. Séquestration de biens et terres des tribus, bannissement et jugement en Cour d’assise sous l’Algérie française. Plus de 200 Kabyles sont internés et de nombreuses déportations ont lieu à Cayenne ou en Nouvelle Calédonie.
Habiter côte à côte
Conçues en quatre sections, comprenant la présentation de la population dans sa diversité, colons, bagnards ou autochtones, les habitats concomitants (camps d’internement ou d’infanterie, case en torchi, maisons coloniales), la mise au travail et enfin la fête, les photos égrainent des éléments de contexte caractéristiques de la colonie de peuplement. Pour l’homme « blanc », partir aux colonies, c’était obtenir des terres mais aussi devenir patron, gagner un statut social, et mettre au travail forcé les indigènes, au service des entreprises exploitant les matières premières (café, coprah, coco, cacao, coton…).
Et contrôler les corps et les âmes.
Les Vanuatais et les Kanaks étaient considérés comme des primitifs dangereux … ils seront une cible privilégiée de la mission civilisatrice légitimant l’enjeu de « sauver les âmes de ces peuples supposés sans croyance ni conscience ». Une visite s’impose pour se faire une idée sur la façon dont ces iles ont abrité l’illusion coloniale.