À l’occasion des longues soirées ramadanesques, les femmes pratiquent le jeu de la boqala en Algérie. Les participantes récitent de courts poèmes qu’elles interprètent ensuite comme des présages. À Marseille, Les Lunes du Ramadan, le rendez-vous annuel du Théâtre de l’Œuvre – en partenariat avec l’association Cultur’all Massalia – invite le public à une série de concerts de musiques d’Afrique du Nord. Un véritable voyage sensoriel révélant les intrications délicates entre héritage de répertoires musicaux et chansons à texte métaphorique et parfois subversif.
La programmation alterne les répertoires savants et populaires, dans un savant dialogue qui réjouit les amateurs marseillais. D’abord avec le chaâbi de Fouad Didi le 5 avril, on attend ensuite El Besta, qui débarque à Marseille pour un concert inédit le samedi 6 avril. Issu de Mostaganem, le groupe offre un embarquement immédiat dans l’univers mélancolique de l’accordéon et de la poésie populaire. Inspirés par les ambiances des qaadates de l’ouest algérien, le quatuor réincarne en live les grands noms et rythmes du Raï en offrant une expérience live immersive unique et intimiste. Sofiane Merabet, avec sa voix puissante et émotionnelle, incarnant l’âme et l’expression authentique du raï est accompagné de Laredj à l’accordéon, Dadi à la derbouka et du bassiste Abed. Issu des nouvelles générations et bien ancré dans notre époque, chantant l’agonie amoureuse, les interdits, la trahison, la fatalité, la passion ou l’ennui, El Besta, entre traditions et modernité, fait du raï un témoignage, à la manière des anciens.
Une musique reconnue
Le raï est une chanson populaire d’Algérie d’origine rurale qui a véhiculé la réalité sociale sans tabou ni censure. Il aborde des thèmes tels que l’amour, la liberté, le désespoir et les pressions sociales. Au début du XXe siècle, les prima donnas y ajoutent des idées transgressives, en chantant la liberté d’aimer et de désirer, tout en glorifiant dieu et les saints. Au fil du temps, le raï s’est progressivement imposé, d’abord au niveau local, lors des rituels et des mariages, puis au niveau mondial grâce à des artistes tels que Chikha Remitti, Khaled, Mami, et aujourd’hui DJ Snake et son fameux Disco Maghreb. Depuis 2022, cette musique est inscrite sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’Unesco.