Depuis quelques années en Europe, l’expression “Crise des migrants” fait florès sous la plume des commentateurs de l’actualité. Celle-ci sous-entend que nous assisterions à une arrivée subite, massive et non désirée d’étrangers qui mettrait en danger les équilibres économiques, sociaux voire culturels de nos sociétés. L’idée d’un “trop plein” de migrants s’est ainsi largement imposée malgré l’importante production scientifique qui montre, toutes disciplines confondues, à quel point cette image est fausse.
Si “crise” il y a, ne s’agit-il pas bien plutôt d’une crise des politiques de l’asile en Europe ? Comment, dans un tel contexte, aborder l’un des sujets les plus importants du moment, sans céder ni à la facilité, ni aux sirènes d’une actualité anxiogène ? En prenant justement de la distance avec l’actualité, et en rappelant que le fait migratoire est une réalité sociale complexe fort ancienne dans la région Auvergne-Rhône-Alpes. En France, les phénomènes migratoires, longtemps exclus de la narration nationale demeurent encore minorés en son sein. De nombreux exemples témoignent néanmoins d’un mouvement de réveil mémoriel, ne serait-ce que depuis l’ouverture du Musée national de l’Histoire de l’Immigration à Paris. Des associations ou des réseaux régionaux oeuvrent également à la reconnaissance des mémoires de l’immigration, interrogent ses représentations et contribuent ainsi à faire prendre conscience à la société française, combien elle est nourrie de diversité culturelle.
Force est de constater que, si les migrants sont très souvent décrits et analysés comme des données statistiques, il existe peu d’espace pour qu’ils s’expriment et soient entendus. A la croisée du culturel, du social, du politique et du scientifique, la présente biennale voudrait être attentive à la voix des “sans voix” en mêlant témoignages, création artistique (arts plastiques, cinéma, musique, poésie, théâtre,) et analyse scientifique.
Réaffirmons l’ambition de Traces : face à la montée des périls, des fermetures chauvines et du racisme, contribuer ensemble, de Clermont-Ferrand à Annemasse, à changer les regards sur le fait migratoire, en escomptant un effet positif sur les rapports sociaux dans la région.