Sabrina Bennefissa est présidente de l’association Espoir et Culture, qui a vu le jour en 2008 suite à a réhabilitation de la cité d’habitat social. Développée avec le soutien du bailleur social Sud Habitat, le Centre Social Bassin de Séon et les associations partenaires et de nombreux habitants engagés pour un meilleur cadre de vie dans leur quartier. Association laïque et au service du vivre ensemble, elle est située au quartier des Tuileries à Saint-André, quartier à valeur patrimoniale ajoutée sur les fabriques de tuiles.
Extrait de la présentation de l’Association, lors d’un entretien avec Zine El Abidine Larhfiri:
Arrivée en France à 21 ans, suite à une enfance et des études à Constantine, Sabrina décide de d’engager au service de son voisinage.
Z- Après la création de votre association, et en fédérant différents partenaires, vous avez réussi à donner vie à un espace de jardin familial et pédagogique qui est devenu un point d’ancrage dans le quartier.
S-Ce qui est bien avec le jardin, c’est que les femmes s’y sentent libres, elles se sont réappropriées l’espace en pied d’immeuble, l’espace public…
Z- Cette liberté ressemble-t-elle à celle qu’on retrouve dans d’autres lieux comme par exemple autour du hammam ?
S- Absolument, surtout parce que ce jardin est à l’abri, derrière les blocs, et qu’il est principalement entretenu par des femmes qui y trouve une certaine intimité et convivialité. Le passage des hommes et très rare, cela n’arrive que pendant les grands travaux. D’autre part, ce qui est aussi très intéressant avec ce jardin, c’est cette pratique d’échanges de savoirs et de transmission, comme à l’occasion de l’atelier proposé par Ancrages Le semis des migrations. Quand les femmes sont de retour de leurs pays respectifs, elle ne rentrent jamais les mains vides, chaque année elles essayent de planter de nouvelles choses, pour pouvoir les partager avec les autres.
Z- J’ai pu assister à des ateliers, notamment celui proposé par Bérengère Michelot de l’association Divers’etik qui répondait à l’intérêt du groupe par rapport à certains usages thérapeutiques et cosmétiques des plantes… Dans ce cas là, le groupe étais très intéressé par les différents usages de la figue de barbarie, qui à la fois peut nourrir et produire de l’huile à partir de ses pépins dont les vertus sont nombreuses.
L’autre est celui proposé par Sybille Depury, ethnolinguiste et administratrice d’Ancrages, qui retrace le parcours migratoire du fruit et de sa dénomination dans le bassin méditerranéen depuis son arrivée du Mexique suite aux campagnes espagnoles….
S- Effectivement, le débat se crée facilement, chacune à son mot à dire et l’intérêt est toujours d’une grande ampleur quand il s’agit de nouvelles pratiques qu’elles peuvent assimiler et inclure à leurs connaissances et leurs pratiques du jardin. jardiner réconcilie avec une forme de soins de soi, de ce qu’on consomme, de comment on cuisine et partage un repas… c’est un véritable mode de vie que les jardins des villes permettent. Par exemple la sortie réalisée dans le cadre de Mixfood au centre de ressources et les réserves du Mucem à la Belle de Mai, d’un grand intérêt patrimonial a permis à de nombreuses femmes de transmette l’usage de certains objets à leurs enfants, tels que les meules, les tamis et autres alambiques..
Z- Comment se fait la délimitation des parcelles dans le jardin ?
S- Chaque famille dispose d’une parcelle et privilégie la culture d’une ou plusieurs plantes en fonction de ses besoins. Ensuite chacun est libre de partager avec qui il veut. On sait que dans la parcelle d’Anissa on retrouve les petits poids, dans celle de Dalila les tomates ; le fait de pouvoir échanger tisse des liens entre le groupe et permet des échanges de recettes, de semis, de temps conviviaux…
Z- On retrouve un aspect essentiel de la vie en Méditerranée, le voisinage.
S- Oui les femmes s’entraident entre-elles. Elles se relaient parfois pour aller chercher les enfants à l’école par exemple, ou bien pour les garder aussi. Et cet échange a été favorisé par les contacts dans le jardin, au début devant la porte des écoles, elles ne se disaient même pas bonjour, personne ne se connaissait.
Z- Vous étiez partis d’un jardin « nourricier », avec les différentes propositions, le jardin à pris une autre ampleur
S- Les repas sont un savoir-faire, c’est pour cela que nous avons démarré avec le « culinaire ». En plus cela nous permet d’accueillir de nombreux partenaires autour des repas solidaires et de financer nos sorties familiales.
Mais effectivement, elles n’ont pas qu’un savoir faire culinaire, donc nous nous sommes orientés vers les institutions éducatives pour le partage de ses savoir-faire, au sein des écoles et collèges.
De la même façon que les repas favorisent le lien des partenaires institutionnels au quartier, les ateliers que l’on propose par exemple dans les écoles rapproche les parents des écoles, avec tout ce que cela implique par rapport à la communication avec les enseignants, CPE et directeurs et l’aide à la parentalité.
Z- Qu’elle est votre vision actuelle sur l’avenir du jardin ?
S- Actuellement nous sommes sur un projet de construction d’aménagement, de tables et bancs avec le Lycée professionnel La Cabucelle. En septembre un deuxième plan de travail sera posé dans le jardin. Nous nous concentrons aussi sur l’autonomie et le compostage, points importants pour la vie du quartier, et finalement nous réfléchissons aussi à la formation des femmes du groupe pour pouvoir y arriver. Notre partenariat avec l’AMIEU est précieux et l’ensemble de nos partenaires nous permettent de qualifier autrement nos interventions.
Z- Merci pour votre action.